CENTRAFRIQUE : L’expatriation et ses conséquences

29 octobre 2014

CENTRAFRIQUE : L’expatriation et ses conséquences

L’exode rural et l’expatriation, sans perspectives de retour, constituent des forces d’inerties opposées au développement. Avant la colonisation la population était plus dense. Les villages étaient plus nombreux. Les populations étaient disséminées en petits groupes tribaux dans la nature. Les sociétés traditionnelles avaient mis sur pied une organisation sociale favorisant l’éducation, la formation et l’intégration automatique de tous les jeunes à la vie active. Les notions telles que : chômage, délinquance juvénile, exode rural, diaspora étaient inconnues.

Les conquêtes esclavagistes et la colonisation avaient causé un dépeuplement du pays. Après l’indépendance et à la fin du régime de          «laissez passer», pour aller d’un endroit à un autre, l’exode rural et l’expatriation ont vidé les villages et le pays de leurs ressources humaines de valeur. Le reste de la population subit la dégradation dans le domaine de la santé et de l’éducation, et est peu qualifié pour mener efficacement des actions de développement durable de leurs localités. Le pays ainsi affecté est devenu vulnérable, sans protection et est l’objet de convoitise des étrangers qui tentent de l’arracher par la force des mains des autochtones. L’exode rural et l’expatriation sont des phénomènes naturels inévitables. Il s’agit de l’évolution lente et naturelle d’un désordre méconnu comme tel.

En effet tous les évènements du monde physique se conforment aux deux principes fondamentaux de la thermodynamique et sont déterminés par ces deux principes. La méconnaissance et la non prise en compte par les planificateurs, les économistes et les décideurs, des manifestations de ces principes aux effets visibles dans la vie quotidienne, est à l’origine des problèmes sociaux, économiques et environnementaux dont souffrent particulièrement les pays sous-développés dont la République Centrafricaine.

Le Premier principe est le principe de conservation de l’énergie  mis en évidence par les expériences d’Antoine de Lavoisier, chimiste, philosophe et économiste français : « Rien ne se perd, tout se transforme ». Selon ce principe l’énergie totale de l’univers demeure constante.

Le deuxième principe établit que l’entropie ou désordre de l’univers augmente. L’entropie est l’état désordonné de l’énergie, de la matière, incapable de fournir un travail. L’entropie ou désordre de l’univers augmente toujours suivant une évolution irréversible. Il en résulte que l’énergie totale de l’univers subit une dégradation constante vers une forme qui ne peut plus effectuer un travail. Voici trois exemples pour comprendre  ce phénomène :

  1. Le soleil diffuse continuellement de l’énergie dont une partie est interceptée par la terre. C’est d’ailleurs le premier facteur de la vie sur la terre. Le soleil, ressource de basse entropie ou ressource ordonnée, capable de jouer son premier rôle en diffusant continuellement de l’énergie, se dégrade, diminue dans le même temps, tandis qu’à l’échelle de l’univers, l’énergie diffusée n’est pas perdue, mais se trouve dans un état désordonné inutilisable comme tel, stockée dans les matières organiques et dans les combustibles fossiles (ressource de haute entropie). On estime que la vie active du soleil durera encore quelques 5 milliards d’années.
  2. L’érosion des sols : Un sol érodé ne subit aucune perte au niveau de la biosphère, mais ses éléments constitutifs se trouvent, contrairement à ce qu’on observe dans le cas d’un sol en place, dans un état de désordre, dispersés dans le réseau hydrographique, dans les retenues des barrages, au fonds des lacs, des mers et des océans. Un sol érodé dont l’entropie est devenue maximale ne peut plus être utilisé comme terre agricole (par exemple). C’est une ressource de haute entropie.
  3. L’exode rural et l’expatriation : Les villages traditionnels de la période précoloniale sont des ressources de basse entropie. Les éléments constitutifs de la population restaient en place et contribuaient tous à la pérennisation des lignées et au développement des villages. Les mutations étaient relativement rares et isolées. Le contact avec l’Occident a déclenché ou accéléré un processus d’érosion des populations. A l’échelle de l’humanité les villages ne subissent aucune perte, car les éléments de leurs populations qui les avaient quittés sont tout simplement dispersés et existent à travers le monde, mais dans un état désordonné, incapable de participer au peuplement, à la cohésion, à la vie du village, à son développement et à sa pérennisation. Le processus se poursuivant, les villages se dégradent quantitativement, qualitativement et finissent par disparaître comme groupes organisés ou ressource de basse entropie.

Fort heureusement dans certains cas, l’augmentation de l’entropie peut être inversée artificiellement. Il est possible d’y opposer des mécanismes néguentropiques. Les actions de défense et restauration des sols pratiquées en agriculture durable sont des mécanismes néguentropies qui s’opposent à l’érosion des sols.

Ces dernières années des membres de la diaspora interne se sont organisés en associations à travers le pays  pour contribuer au développement local, en y opposant des mécanismes néguentropiques. C’est le cas de l’Association dénommée « Centre d’Initiatives et d’Appui aux Actions de Développement durable (CIAADD) dont le but est d’offrir un cadre approprié permettant aux populations, tant celle de la diaspora interne et externe, que celles restées en place dans les villages, de contribuer ensemble à la survie et au développement de leurs villages, même si ces deux catégories de population sont séparées par d’énormes distances.

La responsabilité de développement d’une localité donnée incombe en premier lieu aux personnes qui en sont issues, tant la population locale que sa diaspora. C’est pour avoir manquer d’assumer cette responsabilité que les centrafricains récoltent aujourd’hui les fruits amers de leur négligence. Il faut donc agir maintenant et efficacement. Mises ensemble, bien organisées et encadrées, les populations locales et leur diaspora constituent une ressource colossale de basse entropie, capable de venir à bout des problèmes dont elles souffrent.

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